Les Légendes de la Table

Burning Wheel - Se Battre Pour Ses Croyances

Une fois n’est pas coutume je vais me permettre de parler d’un jeu auquel je n’ai encore jamais joué. Cependant ce tort sera rapidement corrigé car fin août je démarre un nouveau groupe pour jouer à Burning Wheel.

Burning Wheel, c’est quoi ?

Burning Wheel est un jeu de rôle médiéval fantastique créé par Luke Crane. Ce jeu est à l’origine de jeux dérivés du même auteur Mouse Guard et Torchbearer.

Burning Wheel dispose de mécaniques de jeu qui sont très différentes des grands classiques systèmes D20 tels que D&D ou Pathfinder.

Comme le dit l’auteur lui même dans le supplément Codex, Burning Wheel est un jeu bourré de contradictions. C’est un jeu sans univers pré-établi, mais le système de création de personnages impose un univers médiéval, avec plus ou moins de fantastique selon vos choix. C’est un jeu centré sur les personnages et leurs conflits personnels, et qui donc se prête à un jeu en mode très narratif, mais qui contient une tonne de règles très minutieuses pour simuler des combats, dans 3 sous-systèmes différents pour les joutes orales, les combats à distance et les combats rapprochés.

C’est avant tout un jeu qui a la simple idée de récompenser mécaniquement les joueur·euse·s pour avoir incarné leur personnage, avoir agi d’une manière qui les a mis dans des situations périlleuses, pour avoir accompli leur quête personnelle, ou tout simplement pour avoir déclenché l’hilarité générale autour de la table, mais in character.

Burning Wheel est un jeu qui interpelle, voire qui intimide. Beaucoup de règles, beaucoup de systèmes qui semblent étrangers, peu de conseils sur comment mener les parties ou construire des scenarii, si ce n’est “utilisez les croyances, les instincts et les traits des personnages pour les confronter”.

Cependant la simple lecture de ce livre est déjà une immense source de plaisir, et un coup de pied vigoureux dans l’imagination.

C’est un jeu qui veut forcer le ou la rôliste à sortir de sa zone de confort et à s’exposer en jeu, dans la fiction mais aussi autour de la table, parce que c’est le seul moyen de progresser.

Comment le jeu atteint ses objectifs

Burning Wheel utilise un système de réserve de D6s pour résoudre tous les tests. Que l’on teste un attribut directement (Test de Puissance), qu’on teste une compétence (Test de Sorcellerie pour lancer un sort) ou qu’on teste en opposition contre un PNJ ou un·e autre joueur·euse, on prend un certain nombre de D6, on les lance, et on compte le nombre de dés ayant obtenu 4,5, ou 6 comme des succès.

Si le nombre de succès atteint l’obstacle fixé par le MJ, ou bien si on dépasse le nombre de succès de l’adversaire lors d’un test en opposition, alors on obtient ce qu’on voulait.

Règle très importante, on ne teste qu’une fois. Si c’est réussi, vous obtenez ce que vous vouliez, sinon, vous subissez les conséquences, mais il n’est pas possible de retester avant un changement significatif des conditions de la fiction.

Jusque là, c’est très simple.

Mais ce n’est pas tout. Avant de lancer les dés, les joueur·euse·s ont plusieurs moyens d’ajouter des dés à lancer, pour augmenter les chances de succès :

  1. chaque compétence dans laquelle le personnage est entraîné et qui peut raisonnablement contribuer au test va ajouter 1 dé à la réserve. Par exemple, si je négocie un prix avec un marchand, je vais tester ma compétence de Négociation. Mais je peux ajouter un dé supplémentaire si j’ai également la compétence Persuasion, et encore 1 dé si j’ai la compétence “Platitudes apaisantes”. Je dois décrire ou idéalement jouer la scène en montrant que j’exploite ces compétences dans ma négociation.
  2. un·e autre joueur·euse qui a également la compétence testée peut m’aider, en me donnant un dé supplémentaire. Il ou elle s’expose ainsi à un certain risque si le test échoue.
  3. Un·e joueur·euse qui s’est positionné·e dans la fiction dans une situation avantageuse peut également obtenir 1 ou 2 dés supplémentaires dit “dés d’avantage”.

On voit déjà là un début d’incitation mécanique à jouer son rôle, mais attendez, ce n’est que le début !

Burning Wheel donne aux joueur·euse·s accès à une méta monnaie, des points d’Artha, qui sont distribués en fin de partie selon leur prestation.

Ces points viennent en trois variétés, et peuvent être dépensés pour augmenter les chances de réussite d’un test à fort enjeu.

Les points de Destin, les plus simples à obtenir, permettent par exemple de faire exploser ses 6. Un 6 obtenu sur le test compte comme un succès, mais permet en plus de lancer un dé supplémentaire pour obtenir encore plus de succès.

Les points de Persona, qui sont attribués pour avoir par exemple été l’élément moteur sur une session, ou pour s’être distingué·e en role-play, permettent en les dépensant d’avoir un effet encore plus fort sur un lancer, voire même d’échapper à la mort, juste pour cette fois.

Les points d’Exploits vont avoir un effet encore plus radical, comme par exemple doubler le nombre de dés à lancer pour un test.

Cette méta monnaie, récompensant le role-play, pour booster les chances de réussir un lancer, c’est le truc qui me donne envie de maîtriser Burning Wheel, pour voir mes joueur·euse·s sortir le grand jeu.

Luke Crane a même pensé à l’incitation ultime du système, pour éviter que les joueur·euse·s de thésaurisent trop ces points : chaque point d’Artha dépensé dans une compétence ou un attribut est noté, et à force, cet attribut ou cette compétence peut recevoir une amélioration permanente, non pas simplement en nombre de dés lancés, mais plutôt se mettre à considérer les résultats de 3 sur un dé comme un succès, puis après une ultime amélioration légendaire, considérer tout résultat sauf un 1 comme un succès.

Croyances, instincts, traits

On l’a vu, Burning Wheel récompense le role-play par un système de points d’Artha qui permettent aux joueur·euse·s d’augmenter leurs chances de succès sur un lancer, et à plus long terme sont un investissement dans certaines compétences pour les rendre plus puissantes en élargissant les résultats considérés comme un succès sur les dés.

Mais comment donner une vie aux personnages, et comment guider les joueur·euse·s vers cet idéal ?

Grâce aux croyances, instincts et traits.

Commençons par les traits :

Chaque personnage de Burning Wheel est créé avec un certain nombre de traits qui aident à définir son apparence, ses manies, et peuvent lui conférer des avantages et des inconvénients. Par exemple : Arrogant, Ambitieux, Gros, Laid, Alcoolique, Agoraphobe.

Les traits qui donnent un avantage peuvent être utiles, mais les traits négatifs sont encore plus intéressants : lorsqu’ils vous mettent dans la mouise, ou qu’ils entraînent l’histoire dans une direction imprévue, ils vous donnent un point de destin.

Si les traits doivent être achetés parmi une liste et selon l’historique de votre personnage, les instincts sont plus libres. Chaque joueur en a 3, et ils sont une expression de quelque chose d’automatique à propos du personnage. Par exemple “Je dis toujours la vérité, même quand elle n’est pas bonne à dire.”, ou bien “Je ne laisse jamais filer une opportunité de gagner de l’argent.”

Les instincts peuvent servir à se prémunir de certaines situations, par exemple “je dors toujours avec une dague sous mon oreiller”, mais ils sont aussi une mine de points de destin quand ils vous les jouez et qu’ils vous mettent dans le pétrin.

Les Croyances enfin, sont les principes fondamentaux de vos personnages : leur guide moral, leur objectif, leur foi… Quelques exemples, tirés du livre de base : “Les malfrats du coin sont une bande d’incapables désorganisés. Je prendrai leur tête et avec eux je dominerai la ville.” ; “Si Druath ne peut pas être ramené à la raison, alors mon devoir est de le tuer moi-même.”

Les croyances des personnages sont la chose la plus importante, elles doivent guider le ou la MJ dans ses préparatifs : taper dans les croyances des personnages, c’est sa mission.

Les croyances, c’est le moteur à scène dramatique du jeu, et elles sont entièrement sous le contrôle des joueur·euse·s. Elles sont le moyen de dire à tous ce qui vous intéresse, ce que vous voulez faire et surtout subir. Énoncez vos croyances, et vous serez exaucé·e.

Pour qui ?

Burning Wheel est relativement complexe, et se prête à un jeu plutôt dramatique. Le niveau de fantastique peut être très variable, du simulateur de village médiéval à la guerre intestine entre dieux rivaux.

Je dirais que c’est un jeu qui s’adresse plutôt aux joueur·euse·s expérimenté·es, qui ont envie de prendre les rennes de l’histoire et d’y raconter des choses personnelles, et difficiles.

Liens utiles

Images © Burning Wheel - Luke Crane

#Burning Wheel